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Suivre la dynamique de l’eau dans le sous-sol grâce à la gravimétrie

Il est 8h en ce matin 6 mars 2023. Il fait 3 degrés sous un ciel couvert. Dans la cour intérieure de l’Ecole et observatoire des sciences de la Terre de Strasbourg, nous chargeons deux gravimètres relatifs de terrain dans la voiture, bien protégés dans leur caisse rembourrée. J’accompagne Nolwenn Lesparre et Frédéric Masson, géophysiciens, et Jean-Daniel Bernard, ingénieur en gravimétrie, pour la journée.

Nous nous rendons à Aubure, dans le Haut-Rhin, sur le versant montagneux du ruisseau Strengbach, où est installé l’Observatoire hydrogéochimique de l’environnement (OHGE), afin d’effectuer une série de mesures gravimétriques. D’autres journées sont prévues par la suite, juste après des épisodes pluvieux, pour observer l’infiltration des pluies dans le sous-sol. L’objectif du projet (DREEM), financé par l’Institut Terre et environnement de Strasbourg, est d’utiliser les données recueillies dans la construction et la calibration d’un modèle reproduisant les écoulements souterrains pour comprendre la dynamique de l’évolution des eaux dans ces zones de moyenne montagne.

Nolwenn Lesparre est chercheuse à l’Institut Terre et Environnement de Strasbourg. Elle applique des méthodes géophysiques pour imager le sous-sol afin de suivre la dynamique des variations des stocks d’eau dans le temps et dans l’espace. Elle nous présente ses travaux lors d’une journée de mesures sur le site de l’observatoire hydrogéochimique de l’environnement à Aubure, dans le Haut-Rhin, à plus de 1000 mètres d’altitude (2:00 mn)

Au bout d’une heure de route, nous atteignons le village d’Aubure, avant de commencer la montée vers le point culminant du site de l’OHGE, où une antenne France Télécom est installée. La construction à sa base héberge un gravimètre supraconducteur qui va servir de référence. L’idée est de mesurer la différence de gravité par rapport à cette référence, à différents points du bassin versant, avec nos deux gravimètres relatifs. Cela induit une boucle répétée du sommet du site vers les divers points à mesurer.

Au sommet, la température est de -4°. La journée s’annonce rude…

Nous installons les deux gravimètres relatifs sur la dalle en béton qui jouxte le bâtiment technique au pied de l’antenne : pose du trépied support, puis du gravimètre orienté vers le nord, mise à niveau de l’ensemble grâce aux pieds réglables du support, mise en route de l’instrument et réglage des paramètres. Les deux gravimètres sont recouverts d’une poubelle sans fond destinée à les protéger du vent (et du soleil, mais ce n’est malheureusement pas nécessaire aujourd’hui).

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Déchargement des gravimètres

Déchargement des gravimètres relatifs.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Le point de mesure de référence, au sommet du site

Le point de mesure de référence, au sommet du site (1146m).

Carte du bassin versant du Strengbach à Aubure, avec les différents points de mesure et captage.

Carte du bassin versant du Strengbach à Aubure, avec les différents points instrumentés © Nolwenn Lesparre.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Le trepied support

Le trepied support.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Le gravimètre relatif CG6 de Résif

Le gravimètre relatif CG6 de Résif sur le trepied.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Réglage des paramètres

Réglage des paramètres.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Lancement des mesures

Lancement des mesures.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Pose de la protection autour du gravimètre

Pose de la protection autour du gravimètre.

Frédéric Masson est professeur à l’Université de Strasbourg, spécialiste de géodésie. Il participe au projet DREEM de l’Institut Terre et Environnement de Strasbourg, dont l’objectif est d’effectuer des mesures gravimétriques et de résonnance magnétique protonique  pour collecter des données sur la dynamique des stocks d’eau sur la bassin versant du Strengbach, situé dans le Haut Rhin, sur la commune d’Aubure. Les données recueillies seront utilisées pour la construction et la calibration d’un modèle reproduisant les écoulements souterrains pour comprendre la dynamique de l’évolution des eaux dans ces zones de moyenne montagne.

Une fois la mesure commencée, nous nous éloignons des instruments pour éviter toute perturbation. Il faut entre 5 et 15 minutes au gravimètre pour se stabiliser et effectuer des mesures fiables. L’un des instruments est issu du parc Résif Pgrav. C’est un Scintrex CG6, modèle plus récent et plus performant que l’autre, un Scintrex CG5, qui met trois fois plus de temps à se stabiliser.

Nous vérifions au bout d’une vingtaine de minutes que les données ont bien été enregistrées et sont fiables, avant de recharger les instruments dans la voiture pour rejoindre le second point de mesure, une petite dalle en béton de 30 x 30 cm quelque part au milieu des arbres au dessus du chemin forestier prévue pour cet usage. Il nous faudra 10 mn pour la trouver sous une branche tombée. Ensuite, le même processus d’installation, réglage et mesure reprend, pour un gravimètre puis l’autre puisqu’il n’y pas de place pour deux en même temps.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Dégagement d'un point de mesure

Dégagement de la dalle en béton destinée à accueillir l’instrument.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Acheminement des gravimètres vers le point de mesure

Acheminement des gravimètres vers le point de mesure.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Mise à niveau du gravimètre

Mise à niveau du gravimètre.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Réglage des paramètres du gravimètre

Réglage des paramètres.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Notation des résultats de mesures

Notation des résultats de mesures.

Nous mesurerons ainsi six points différents, entre le sommet et le fond du vallon, près du ruisseau. La journée se déroule avec des retours au point de mesure initial, un sandwich vite avalé près de la voiture et quelques tasses de thé de nos thermos.
Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Accès difficile au fond du vallon

Accès difficile au fond du vallon.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Relevé des mesures.

Relevé des mesures au dernier point, au fond du vallon.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - Rangement des gravimètres

Chargement des gravimètres.

Suivre la dynamique de l'eau dans le sous-sol par la gravimétrie : campagne à Aubure mars 2023 - De retour à l'Eost, déballage des gravimètres pour transfert des données.

De retour à l’Eost, déballage des gravimètres pour transfert des données.

Il est plus de 16h lorsque nous bouclons la boucle et reprenons la route vers Strasbourg et la chaleur des bâtiments. Nolwenn effectue les premiers calculs de différence entre les mesures qu’elle a notées sur son carnet de terrain. Un écart anormal est constaté entre deux mesures et une discussion entre Nolwenn, Frédéric et Jean-Daniel s’engage. Elle permet d’identifier et de relativiser le problème, dû à la chute brutale de température entre la caisse de protection des gravimètres ce matin (mis en charge durant toute la nuit, ils ont conservé leur chaleur dans le caisson en polystyrène) et la température extérieure très basse. Il faudra veiller, la prochaine fois, à laisser les instruments revenir à température ambiante avant de relever les données.

Une fois arrivés à l’Eost, il faut encore télécharger les données qui seront exploitées dans un premier temps par un stagiaire de Master 2 de Rennes en stage à l’Eost.

A 18h, cette longue journée s’achève. Espérons une météo plus clémente pour la prochaine sortie.

Texte et crédits photos : Véronique Bertrand, Epos-France/EOST, mars 2023

En savoir plus

Le site de l’OHGE sur le bassin versant du Strenbach